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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/209

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battant. Ils s’en allèrent donc où je les envoyai et y rendirent de grands services, car de jour comme de nuit ils faisaient des descentes merveilleuses et capturaient beaucoup de canoas et d’Indiens ennemis.

Cette affaire réglée, et me trouvant sous la main des guerriers des villes, dont j’ai parlé plus haut, je les réunis pour leur dire que dans deux jours j’avais résolu de forcer l’entrée de la ville ; qu’ils se tinssent prêts et que je verrais bien, en cette circonstance, s’ils étaient nos amis. Ils promirent d’être là le jour suivant ; je fis préparer tous mes hommes, j’écrivis à Sandoval, à Alvarado ainsi qu’aux capitaines des brigantins ce que j’avais résolu et ce qu’ils auraient à faire.

Le jour venu, le matin, après avoir entendu la messe et renouvelé mes ordres à mes capitaines, je sortis du camp avec quinze ou vingt chevaux, trois cents hommes de pied et tous nos alliés, qui étaient une multitude ; nous enfilâmes la chaussée où, à trois portées d’arbalète, nous trouvâmes les Mexicains qui nous attendaient en poussant de grands cris. Comme il y avait trois jours que la lutte avait cessé, ils avaient rouvert les tranchées que nous avions comblées et les avaient appuyées de plus fortes barricades qu’auparavant. Les brigantins nous accompagnaient de chaque côté de la chaussée et comme ils ne pouvaient arriver près des ennemis, ils les couvraient de boulets, de flèches et de balles. Les voyant ébranlés, les hommes sautent à terre et s’emparent du pont et de la barricade, pendant que nous commençons à passer de l’autre côté à la poursuite des Mexicains qui nous font tête devant d’autres ponts et d’autres barricades ; nous nous en emparons cependant, avec plus de peine que jamais et nous chassons les ennemis de la rue et de la place où s’élevaient des grandes maisons de la ville. Là, j’ordonnai aux Espagnols de s’arrêter, pour attendre que j’eusse comblé les tranchées, travail immense auquel travaillaient plus de dix mille Indiens. Quand la besogne fut achevée, la nuit venait, et pendant tout ce temps mes Espagnols et nos alliés luttaient et se battaient avec les gens de la ville, leur dressant des embuscades où ils en tuèrent des milliers. Pour moi, à la tête de mes cavaliers, je parcourus un moment la ville, perçant de nos lances