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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/312

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vaines : ne voulant point abandonner mon voyage, ne pouvant me rendre à Mexico pour régler cette affaire, je résolus d’y envoyer le commissaire inspecteur et le facteur qui m’accompagnaient, chargés de pouvoirs pour instruire l’affaire, me désigner le coupable et apaiser le différend. Je les chargeai en même temps de pouvoirs secrets, pour que, si les coupables ne voulaient point se rendre à la raison, ils les suspendissent de leurs fonctions de gouvernants, qu’ils rempliraient conjointement avec le licencié Alonzo de Zuazo, et qu’ils punissent sévèrement les coupables. Ces mesures prises, j’expédiai le facteur et le commissaire, certain que leur présence à Mexico apaiserait les passions et calmerait la discorde, ce dont je me trouvai fort débarrassé.

Cette affaire expédiée, je passai la revue des gens qui devaient m’accompagner dans mon voyage. Je trouvai quatre-vingt-treize cavaliers avec cent cinquante chevaux et trente piétons ; je pris une petite caravelle qui venait de m’être envoyée chargée de provisions par la ville de Médellin, j’y ajoutai celles que j’avais apportées, quatre pièces d’artillerie, des arquebuses, des arbalètes et des munitions : je l’envoyai dans la rivière de Tabasco où elle devait attendre que je la fisse mander. J’écrivis à Médellin, priant l’un de mes serviteurs de m’envoyer encore deux autres petites caravelles et une grande barque qu’il devait charger de provisions. J’écrivis à Rodrigo de Paz à qui j’avais laissé la garde de ma maison à Mexico, de me trouver de suite, cinq ou six mille piastres d’or pour payer les provisions que je venais d’acheter, et je demandai en même temps au trésorier de me les prêter, n’ayant plus rien à ma disposition. Il me les prêta, et les petites caravelles chargées comme je l’avais mandé, se dirigèrent vers la rivière de Tabasco. Tout cela me servit de peu, car la route que je suivis pénétrait dans les terres, d’où il était très difficile d’aller à la mer chercher des provisions, le pays étant coupé de rivières et de marais.

L’affaire des caravelles réglée, je me mis en route par la côte me dirigeant sur une province appelée Apisco, située à trente-cinq lieues d’Espiritu Santo ; pour arriver à cette province, en dehors des canaux et des petites rivières que nous traversâmes