Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/68

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m’avaient dit était vrai. Ils ajoutaient qu’à partir de ce jour ils se déclaraient à perpétuité les vassaux de Votre Majesté sacrée et se tenaient prêts à souscrire à toutes choses qui leur seraient commandées pour le service de Votre Altesse. Je fis dresser procès-verbal de cette déclaration ; puis je me résolus à partir avec eux : c’est que d’abord je ne devais pas montrer de faiblesse et qu’ensuite sachant que leurs terres avoisinent celles de Muteczuma et que les rapports entre les deux peuples sont fréquents, j’espérais développer mes relations avec ce grand seigneur.

Quand les Tlascaltecs apprirent ma résolution, ils en furent fort attristés et me jurèrent que j’avais tort ; mais que, puisqu’ils s’étaient déclarés mes amis et les vassaux de Votre Majesté, ils viendraient avec moi pour m’aider en toute occasion ; quoique je m’y opposasse et les priai de n’en rien faire, que cela était inutile, ils me suivirent au nombre de cent mille et arrivèrent avec moi jusqu’à deux lieues de Cholula ; puis, cédant à mes instances ils s’en retournèrent, non sans me laisser encore cinq ou six mille d’entre eux qui restèrent en ma compagnie. Je passai la nuit dans le lit d’un ruisseau qui se trouvait près de la ville, pour renvoyer les gens de Tlascala, de peur qu’ils ne fissent quelque esclandre et parce qu’il était trop tard pour faire mon entrée. Le lendemain de bonne heure, une grande foule vint à ma rencontre au son des trompettes et des tambours ; elle était accompagnée de prêtres en costumes de cérémonie qu’ils portent dans leurs temples. C’est dans cet appareil qu’ils nous conduisirent à la ville et nous installèrent dans un grand édifice où tous mes gens purent se loger à l’aise. On nous y apporta des vivres mais avec parcimonie. Sur notre parcours, nous avions remarqué plusieurs des choses que nous avaient signalées les gens de Tlascala : nous trouvâmes en effet la route royale barrée et l’autre ouverte, il y avait de-ci de-là des trous, certaines rues de la ville étaient barricadées et les plates-formes des maisons étaient chargées de pierres. Sur ce, je devins pensif et plus défiant.

Je rencontrai là divers envoyés de Muteczuma qui venaient conférer avec les gens de la ville ; ils me dirent qu’ils venaient