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Page:Coubertin - Histoire universelle, Tome I, 1926.djvu/43

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empires de l’est : annam

n’y réussiraient-ils point si ce mouvement prenait toute la force qu’il est susceptible d’acquérir. Les Mongols sont certainement remués par les souvenirs de Gengis Khan ; et les ruines de Karakorum sont susceptibles de devenir pour eux un de ces lieux de pèlerinage où s’alimente l’ambition passionnée des peuples déchus. D’autre part ils ont aussi leurs « Bouddhas vivants » et le centre religieux d’Ourga, bien moins prestigieux que celui de Lhassa, renferme peut-être plus de germes d’avenir.


Annam

Le nom d’Indo-Chine est bien choisi s’il signifie que l’influence hindoue et l’influence chinoise se sont partagé le territoire ainsi désigné mais il serait erroné d’en conclure que ces influences s’y soient jamais combinées. La frontière demeure tranchée à cet égard. L’Annam est fils de la Chine. Les Annamites, peuple aborigène de la Chine méridionale, occupaient le Kouan Si, c’est-à-dire les régions de Canton, de Hong Kong et de Macao lorsque, sous la pression chinoise, ils descendirent sur le Tonkin actuel et l’envahirent jusqu’à la baie de Tourane. Au delà ils se trouvaient en présence des Tiams, peuple d’origine malaise et de civilisation hindoue auquel ils disputèrent — et sur lequel ils finirent par conquérir — les territoires qui complètent vers le sud, et jusqu’à la frontière du Cambodge, l’Annam actuel. En 214 av. J.-C. les Chinois annexèrent le Tonkin mais dès 207 un de leurs généraux s’y taillait un royaume indépendant qui s’étendit jusqu’à Canton. Environ un siècle plus tard ce royaume fut supprimé et dès lors, c’est-à-dire pendant plus de mille ans (112 av. J.-C. — 968 ap. J.-C.) l’Annam demeura sous la domination des Chinois et s’imprégna complètement de leur civilisation tout en gardant son caractère propre et ses aspirations à l’autonomie. En 939 profitant des troubles qui précédèrent en Chine l’avènement des Sung, les Annamites s’émancipèrent. Ils disputaient alors aux Tiams la région de Hué dont ceux-ci s’étaient emparés à la fin du viiie siècle. Une fois seulement cette rivalité séculaire fit trêve. Les deux peuples luttèrent ensemble contre les Mongols de Koublaï Khan. Le péril écarté, ils redevinrent ennemis. Un moment dominés par les Tiams qui, les attaquant par mer, prirent pied à Hanoï (1360), les Annamites recouvrèrent la suprématie et, en 1471, parvinrent enfin à détruire le royaume tiam dont les habitants émigrèrent, cédant la place à des cultivateurs annamites.