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Page:Coubertin - Histoire universelle, Tome II, 1926.djvu/187

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histoire universelle

que Louis IX ne rechercha dans ces aventures que ce qu’il considérait comme la gloire de Dieu et son service.

Lorsqu’en 1248 le roi et ses chevaliers s’embarquèrent à Aigues-Mortes, ils se trouvaient seuls à répondre à l’appel pontifical. Un certain nombre de seigneurs français s’étaient découragés en route et étaient demeurés à Lyon. Les échecs précédents n’en étaient pas la seule cause. En Europe on ne s’intéressait plus à la croisade. L’opinion avait cessé d’y croire et s’en détournait. Les Français allèrent hiverner à Chypre ; ils s’y querellèrent avec les habitants. Une chance de réussite pourtant s’offrait. Les Mongols envoyèrent des émissaires proposer une entente contre les Turcs qu’ils abhorraient. Louis IX ne comprit pas. Il se laissa persuader d’attaquer l’Égypte plutôt que la Syrie et passa trois ans à attendre en vain des renforts qui n’arrivaient pas. En 1254 il rentra en France.

À cinq siècles et demi de là (1798) le général Bonaparte débarquait en Égypte à son tour. Il y venait chercher un prestige exotique susceptible de frapper les imaginations et de lui faciliter les entreprises à l’aide desquelles il méditait dès alors d’établir sa fortune. Mais ce n’est pas à ses soldats qu’il était réservé de rendre féconde et à jamais célèbre une expédition aussi inattendue. Par une intuition dont on ne saurait lui être trop reconnaissant, Bonaparte emmenait avec lui un état-major de savants, d’ingénieurs et d’artistes. De leurs travaux naquit une science nouvelle, l’égyptologie. Parmi les objets exhumés se trouva une pierre dont les inscriptions hiéroglyphiques étaient accompagnées d’une traduction en grec. Malgré cela longtemps encore le secret des hiéroglyphes demeura impénétrable. En 1822 enfin Champollion professeur à la Faculté des lettres de Grenoble saisit à force de persévérance et d’ingéniosité la clef de l’étrange alphabet. Dès lors dans tout l’occident, les études égyptiennes prirent un essor passionné. À un autre français, Mariette, d’abord modeste collaborateur au musée du Louvre, il était réservé au cours de fouilles mémorables de retrouver le Sérapéum, la nécropole souterraine contenant les gigantesques sarcophages des Apis. Après trois mille ans une civilisation oubliée reparut ainsi à la lumière. Ces grands initiateurs ont fait à la science et à l’énergie françaises un honneur extrême et mérité la gratitude de l’humanité mise par eux en contact avec une période prestigieuse de son long passé.

Dans un domaine différent, la France a recueilli également de l’illustration. Le percement de l’isthme de Suez fut son œuvre.