Aller au contenu

Page:Coubertin - Histoire universelle, Tome III, 1926.djvu/141

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
137
l’europe à la fin du xve siècle

Mais la lyre possédait une cinquième corde dont il eût été difficile de deviner le rôle prépondérant dans la réalisation de l’accord futur ; c’était la Savoie. Nous avons déjà parlé de l’Italie de la Renaissance. Il y a lieu de compléter par quelques traits sa physionomie à la veille de l’éclosion de ce grand mouvement.

L’État pontifical figurait une longue bande coupée en deux par l’Appenin. Lorsque les papes étaient rentrés de leur exil d’Avignon, ils avaient trouvé Rome transformée en une sorte d’échiquier. Retranchés dans les forteresses qu’ils s’y étaient construites avec les débris des monuments antiques, des seigneurs guerroyaient sans trêve. Le palais de Latran s’écroulait. Nicolas V commença d’édifier le Vatican. Pie II, après lui s’appliqua à déblayer les rues, à abattre les murailles intruses, à rebâtir et à restaurer dans la mesure du possible. Pendant ce temps la fortune de Florence approchait de son apogée. La ville avait été pendant plusieurs siècles la proie d’interminables guerres civiles. Autant qu’ailleurs on s’y était battu entre partisans du pape et de l’empereur, « guelfes » et « gibelins ». Plus qu’ailleurs on s’y était battu entre nobles et bourgeois. Et à défaut d’une victoire définie, ces derniers, par un phénomène assez singulier, étaient sortis de ces longues luttes, grandement enrichis. Il advint alors — et sans doute pour la première fois dans l’histoire — que la propriété mobilière l’emporta en crédit et en considération sur la foncière. Cette nouveauté ne se trouva point compromise par la catastrophe financière de 1347. Le roi d’Angleterre Édouard III avait emprunté à deux des plus puissantes maisons de banque de Florence environ cent cinquante millions de francs qui ne furent jamais remboursés. Il en résulta une faillite retentissante. Les Florentins pourtant continuèrent de s’adonner au commerce de l’argent et d’y trouver de l’agrément et sans doute quelque consolation d’être mal gouvernés. Car ils l’étaient. De temps à autre on recourait par dépit à un dictateur étranger comme ce Gauthier de Brienne, dont les croisades avaient fait un duc d’Athènes et qui, convié à administrer Florence, le fit avec une brutalité sanguinaire (1342) dont ses sujets se lassèrent vite. En ce même siècle la peste désola la cité et réduisit la population au chiffre de soixante-dix mille habitants. Mais la richesse publique n’en souffrit pas ; les recettes continuèrent d’excéder largement les dépenses. Enfin en 1378 un mouvement populaire porta au pouvoir Silvestre de Médicis dont la famille, déjà en vue au xiime siècle, était devenue au xivme l’une des plus riches