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l’empire britannique

par des éléments rénovateurs d’ordre moral, pédagogique et religieux.

Trois ans après son avènement la jeune reine Victoria avait épousé le prince Albert de Saxe-Cobourg qui au cours d’une union sans nuages, lui donna neuf enfants et lui apporta sans jamais se départir de la discrétion que nécessitait une situation délicate entre toutes, l’aide la plus précieuse pour remplir ses devoirs de souveraine constitutionnelle. S’étant attribué le « département du bien public » c’est-à-dire les œuvres de charité et de progrès, le prince-consort y rendit de grands services mais le plus grand fut sans contredit le cachet de simplicité et de transparence qu’en plein accord avec la reine, il conféra à leur vie familiale, constituant ainsi entre la nation et les souverains une sorte d’intimité affectueuse qui n’avait jamais existé nulle part à un pareil degré. À ce spectacle, toutes les aspirations morales qui sommeillaient sous la corruption récente s’avivèrent et, peu à peu, s’assemblèrent en un faisceau bienfaisant. Le peuple s’accoutuma à cette nouveauté au point peut-être de la sous-apprécier et de trouver tout simple que la reine, affligée par un veuvage prématuré (1862) ait continué de donner l’exemple des vertus domestiques et de l’attachement au devoir jusqu’au seuil de l’extrême vieillesse. Mais l’histoire en établissant la psychologie du règne saura relever les traces quotidiennes d’une influence personnelle indéniable exercée par Victoria sur les affaires publiques comme sur les mœurs privées.

Un mouvement d’émancipation et de purification religieuse vint étayer cette action. Depuis longtemps l’Église anglicane avait perdu toute vigueur et tout idéal. Elle n’était plus guère, aux mains des classes privilégiées, qu’un instrument commode d’ingérence et de domination. Mais, à côté d’elle, il y avait d’une part le méthodisme wesleyen[1] très développé parmi les travailleurs manuels qu’il aidait à supporter leurs misères et, de l’autre, la phalange restreinte mais compacte des catholiques dont une persécution persistante entretenait la cohésion et avivait l’ardeur. Entre les deux se groupèrent de jeunes clergymen épris à la fois de la belle austérité morale des ancêtres puritains et de cet éclat cultuel catholique dont manquaient si complètement les

  1. C’est en 1729 que Wesley et son frère avaient fondé à Oxford le petit club d’étudiants d’où était sorti le méthodisme. Peu écouté d’abord en son pays, Wesley avait connu le succès en « agitant » le peuple des États-Unis. Les méthodistes sont encore puissants en Amérique. L’armée du Salut fondée en 1865 fut une sorte de néo-méthodisme.