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LA VIE POLITIQUE EN EXTRÊME-ORIENT (1902-1903).

sur les importations comme sur les exportations. Il est entendu qu’après la suppression des barrières de likin et autres stations de perception, elles ne pourront être rétablies sous quelque forme que ce soit ; qu’en aucun cas l’augmentation de taxe ne pourra dépasser une fois et demie le droit d’importation autorisé par le protocole de Péking du 7 septembre 1901 ; que le paiement de cette surtaxe assurera complète franchise aux marchandises étrangères sous quelque forme et dans quelques mains qu’elles se présentent ; etc. » L’annexe B au traité règle l’emploi des fonds provenant de la surtaxe prévue par l’art. VIII. Ces fonds doivent aller aux provinces et les indemniser de la perte qui leur est causée par l’abolition du likin : c’est en effet le trésor provincial qui encaisse ce droit, moins des prélèvements envoyés régulièrement à Péking. Mais d’autre part, grâce au mode de perception, une grande partie de l’argent versé reste aux mains des employés et des fermiers de l’impôt ; ceux-ci seraient privés de leurs moyens d’existence et il n’est pas douteux qu’ils ne missent en œuvre leur ingéniosité, leur impudence, leur influence prépondérante dans les yamens pour combler leur déficit par des voies détournées. La question est complexe : d’abord financière, elle met aussi en péril toute une classe de la société. Cette réforme ne pourra être appliquée que quand elle aura été consentie par toutes les puissances ayant la clause de la nation la plus favorisée.

Pour ces raisons, on s’est demandé si la suppression du likin ne restera pas sur le papier ; on a surtout douté de l’avantage pratique que présenteront et cette suppression et l’ouverture promise de cinq nouveaux ports (Tchhang-cha au Hou-nan, Ngan-khing au Ngan-hoei, Oan-hien au Seu-tchhoan, Hoei-tcheou et Kiang-men au Koang-tong), en face de l’augmentation des droits (12,50 pour cent au lieu de 7,50 pour cent au maximum). Des critiques vives et détaillées ont été formulées. « C’est une doctrine bizarre, écrivait M. E. S. Little dans le North China Herald[1], que les étrangers doivent être taxés et souffrir des privations pour que la Chine se réforme : c’est à la Chine que les réformes profiteront, n’est-ce pas elle qui doit les payer ? » La question a été discutée à fond (27 octobre 1902) par la China Association qui, finalement et à une très faible majorité, a approuvé le traité en demandant au Gouvernement britannique de réclamer des explications précises et des assurances formelles sur quelques détails. Le traité a été ratifié ; mais il n’y a pas à douter que la facilité et la fréquence des communications sur les voies ferrées et les grands fleuves feront plus pour la suppression du likin que toutes les mesures directes.

  1. 15 octobre 1902.