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Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/189

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tence, insistant sur la sympathie, la popularité dont ils jouissaient parmi les soldats.

Martha écoutait avec une attention fiévreuse, en s’efforçant de lire sur la physionomie de son interlocuteur qui se tenait obstinément à contre-lumière. Grand, svelte, il paraissait jeune encore et d’une souplesse, d’une vigueur qui défiait la fatigue. Il donnait bien l’impression de l’homme de tête et de main propre au dangereux métier qu’il faisait.

Sous le bandeau qui aveuglait son œil gauche, le bas de la figure s’enfonçait davantage dans l’ombre sans permettre de saisir aucun de ses traits. Seul, au fond de ce sombre visage dont les contours se détachaient à peine sur la demi-obscurité, l’œil droit lançait par moment un vif éclair. Il parlait couramment avec une voix douce et ferme à la fois, laquelle, malgré son bizarre accent, troublait étrangement la jeune fille. Où donc avait-elle cru entendre le son de cette voix ?

Mais en ce moment, le plafond résonna sous un bruit de pas : Théodore s’était levé sans doute et, inquiet de l’absence prolongée de sa fille, tournait dans la petite salle à manger délibérant s’il n’irait pas aider Martha à congédier cette Mme Moens, bonne femme assurément, mais commère redoutable qui ne déparlait pas.

Aussitôt le pseudo-officier annonça qu’il se retirait :

— Ma mission est accomplie, Mademoiselle. Je vous remercie de votre bon accueil… On m’avait dit du reste que j’y pouvais compter…