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Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/21

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vous en causer souvent car il venait à chaque instant avant la guerre pour lui offrir des marchandises… Mosheim, mais c’est un représentant de fabriques allemandes… Il dit qu’il est Alsacien… un Prussien oui ! Et moi je sais depuis longtemps que c’est un espion…

La stupeur effarée du pauvre vieux aiguisait sa méchanceté :

— Oui, celui-là doit vous en vouloir, car votre fils l’a toujours envoyé promener en disant qu’il ne se fournissait qu’en Angleterre et en France…

Il éprouvait une satisfaction maligne à dénigrer indirectement toutes les initiatives de Prosper, à insinuer qu’elles devenaient très compromettantes aujourd’hui.

— Ça est plein de marchandises anglaises ici. À votre place, je les bazarderais à n’importe quel prix d’autant plus, entre nous, qu’elles ne valent pas mieux que les autres.

Mais le vieillard, déjà renfoncé dans son chagrin, ne l’écoutait plus. La guerre commençait du reste à affaiblir son bon cerveau. Souvent, le petit Bernard et Jan Lust, présents à ces entretiens, s’indignaient des propos du sellier et la langue leur démangeait de lui dire son fait.

Malheureusement, le premier se sentait trop faible dans sa disgrâce physique, tandis que l’autre, nouveau venu à la quincaillerie n’osait apostropher une vieille connaissance du patron. Cela dura jusqu’au jour où Adélaïde, surgissant tout à coup de derrière un stand, s’élança au-devant du sellier et, avec son franc parler, le