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Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/261

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On avait plus ou moins pardonné au méchant homme en le jugeant surtout du point de vue de sa bile congénitale, laquelle, à de certaines heures, le rendait peut-être aussi irresponsable qu’un pensionnaire de Gheel.

Le hargneux sellier se remettait lentement de la crise qui l’avait tordu comme un cep au lendemain de la visite du pseudo feldgrau. Quelle stupeur d’apprendre que toutes ses « cachettes » étaient repérées et qu’il ne tenait qu’au bon plaisir de l’audacieux espion de le dénoncer à la Kommandantur ! Terrible menace ! Car ce n’était pas seulement la prison pour le dissimulateur, mais la colossale allemande, c’est-à-dire la ruine irrémédiable.

Le coup avait été si rude que, malgré l’armistice, le vieux grigou ne s’en relevait pas. Aussi bien, l’apparente sollicitude de ses anciennes connaissances, loin de lui apporter aucun soulagement, le remplissait d’une honte rancunière qui n’aidait pas aux soins dévoués de sa bonne femme non plus qu’aux remèdes du docteur Buysse. Les scorpions de l’envie continuaient de grouiller en lui, de hérisser son âme contre tout le monde et singulièrement contre Vergust, ce tripier plein de chance dont la fausse commisération lui était un motif de plus de le détester.

Après cela, l’annonce des multiples fiançailles qui réjouissaient les familles d’alentour n’était pas faite pour apaiser sa sourde fureur. Pourquoi, seule entre toutes, une demoiselle aussi accomplie que la sienne, n’était-elle recherchée