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Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/15

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

jansénisme en y faisant guerre à mort aux Pères de l’Oratoire. Elle avait fait sur la grâce et contre les Quesnellistes un livret charmant, avec cette épigraphe : Servile Domino in lætitiâ, ce qui n’était pas un avis inutile à ces tristes pédagogues, et ce qui lui valut du P. Delalande une longue réplique où les rieurs ne furent pas du côté des Oratoriens[1]. Le Pape Lambertini l’avait honorée d’un Bref apostolique à l’occasion de son ouvrage, et tout ceci faisait à Mlle de Musset un honneur infini ; mon cœur moliniste en fut ému tendrement et dans un accord parfait avec nos traditions familières.

Je passe à Vendôme pour aller à mes Gastines, et je me fais conduire au logis de cette illustre fille, où j’eus la contrariété de ne la trouver point, vu qu’elle était sur la route de ses closeries, qui étaient dans le bas Vendômois. Mlle de Musset n’allait jamais en voiture : elle avait peur en voiture ; elle avait peur à cheval. Elle avait aussi l’horreur des ânes, et c’est une infirmité qui (néanmoins) l’avait toujours empêchée de sortir de son petit pays. Elle ne voulait aller jamais que sur ses jambes, et n’avait jamais dépassé Châteaudun du côté de Paris, pourtant son mérite, assisté de la poste aux chevaux, l’aurait fait parvenir en toute sûreté d’existence et pleine sûreté d’amour-propre. C’est toujours en vain que je l’ai priée, fait prier, et je puis

  1. Voyez Lettres d’une consœur de la congrégation séculière de Nostre-Dame de Liesse à Messire François de Fitz-James, Évêque de Soissons. Blois, chez louis Martel, imprimeur de l’évêché, 1744, avec privilége du Roi.