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Page:Créquy - Souvenirs, tome 8.djvu/51

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

peu trop vite, et nous allons y rentrer pour assister au sortilége du M. Duvivier, à qui la Vicomtesse de Beauharnois[1] avait fait demander des nouvelles de son mari. On savait qu’il avait dû comparaître pendant la matinée de la veille au tribunal révolutionnaire, et les journaux n’avaient pas encore parlé de son jugement.

C’était au milieu de la nuit : on fut réveiller une petite fille de la geôle, et moyennant un assignat de cinquante francs qui valait quarante sous, le père de la pupille arrangea tout ce qu’il fallait à M. Duvivier, le grand Cophte, ce qui consistait dans la petite fille, avec une table, une carafe remplie d’eau claire et trois bouts de chandelle. On les disposa comme en triangle autour de la carafe au plus près possible, afin que la colombe y vît plus clair, et M. Duvivier lui tenait ses deux mains sur la tête, en lui disant : — Voyez ! voyer ! — Que voyez-vous ?

Il avait dressé son intention sur M. de Beauharnois, et la petite fille répondit en réchignant : — Je vois dans une petite chambre un citoyen qui dort à côté d’un autre citoyen qui écrit sur un papier qui est sur un gros livre.

— Savez-vous lire ?

— Oh ! non, citoyen. — Ah ! le voilà qui coupe ses cheveux et qui les met dans un papier…

    Elle avait toujours la camisole de force et s’était rongée les mains jusqu’à l’avant-bras, comme une hyène enragée.

    (Note de l’Éditeur.)

  1. Joséphine-Rose Tascher de la Pagerie, femme en secondes noces de Napoléon Buonaparte, morte au château de Malmaison le 29 mai 1814, âgée d’environ 54 ans.
    (Note de l’Éditeur.)