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Page:Curwood - Kazan, trad. Gruyer et Postif.djvu/245

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Jour et nuit, sous le soleil automnal comme sous les étoiles, il courait sans trêve à travers monts et vaux. Parfois, épuisé et tombant d’inanition, il tuait un lapin et en mangeait quelques bouchées, puis dormait une heure ou deux, pour se relever et repartir ensuite.

La quatrième nuit, il atteignit la vallée qui descendait vers le marécage.

Il suivit le cours du torrent et passa, sans y prêter attention, près de la première colonie de castors. Mais, lorsqu’il arriva à la seconde cité, élevée par Dent-Brisée et par sa troupe, il se trouva tout désappointé. Cela, il l’avait oublié.

Dent-Brisée et ses ouvriers avaient achevé et parfait leur œuvre. L’étang artificiel qui recouvrait le marécage avait encore accru sa surface et l’arbre creux, nid douillet contre les frimas, avait complètement disparu. Le paysage même était méconnaissable.

Kazan demeura immobile et sidéré, devant toute cette eau, reniflant l’air en silence, l’air imprégné de l’odeur nauséabonde des usurpateurs.

Alors, son courage lui faillit, sa belle endurance tomba. Ses pattes étaient endolories de la longue et rude randonnée. Ses côtes, amaigries par une nourriture insuffisante, saillaient. Pendant toute la journée, il tourna autour de l’étang et chercha. La crête velue de son dos s’était aplatie et l’affaissement de ses épaules, le regard mobile et inquiet de ses yeux lui donnaient une apparence de bête traquée. D’ici encore, Louve Grise était partie !

Elle aussi, cependant, avait passé là. Comme il flairait tout le long du torrent, un peu en amont de l’étang, Kazan découvrit un petit tas de coquilles fluviales brisées. C’étaient les reliefs d’un repas de la louve aveugle.

Kazan renifla l’odeur presque effacée de Louve