Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/123

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cevoir, quoiqu’en courant, des choses qui échappent aux yeux blasés des indigènes.

De tout ce que je vois en ce monde et surtout en ce pays, il résulte que le bonheur n’est pas le vrai but de la mission de l’homme ici-bas. Ce but est tout religieux : c’est le perfectionnement moral, la lutte et la victoire.

Mais depuis les usurpations de l’autorité temporelle, la religion chrétienne en Russie a perdu sa vertu : elle est stationnaire ; c’est un des rouages du despotisme : voilà tout. Dans ce pays où rien n’est défini nettement, et pour cause, on a peine à comprendre les rapports actuels de l’Église avec le chef de l’État, qui s’est fait aussi l’arbitre de la foi, sans cependant proclamer positivement cette prérogative : il se l’est arrogée ; il l’exerce de fait ; mais il n’ose la revendiquer comme un droit ; il a conservé un synode : c’est un dernier hommage rendu par la tyrannie au Roi des rois et à son Église ruinée. Voici comment cette révolution religieuse est racontée dans Lévesque, que je lisais tout à l’heure.

J’étais descendu de voiture à la poste, et pendant qu’on allait me chercher un forgeron pour raccommoder une des mains de derrière de ma calèche, je parcourais l’Histoire de Russie, d’où j’ai extrait ce passage, que je vous copie sans y changer un mot :