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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/146

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venir ce que vous avez lu partout : que cette ville est un pays tout entier, et que les champs, les lacs, les bois renfermés dans son enceinte mettent des distances considérables entre les divers édifices dont elle est ornée. Il résulte d’un tel éparpillement un surcroît d’illusion ; la plaine entière est couverte d’une gaze d’argent ; trois ou quatre cents églises ainsi espacées forment à l’ail un demi-cercle immense ; aussi lorsqu’on approche pour la première fois de la ville vers l’heure du soleil couchant et que le ciel est orageux, on croit voir un arc-en-ciel de feu planant sur les églises de Moscou ; c’est l’auréole de la ville sainte.

Mais à trois quarts de lieue environ de la porte, le prestige s’évanouit, on s’arrête devant le très-réel château de Pétrowski, lourd palais de briques brutes, bâti par Catherine II dans un goût bizarre, d’après un dessin moderne surchargé d’ornements qui se détachent en blanc sur le rouge des murs. Cette parure, de plâtre, à ce que je crois, et non de pierre, tient du gothique, mais ce n’est pas du gothique de bon style, ce n’est qu’extravagant. L’édifice est carré comme un dé ; régularité de plan qui ne rend pas l’aspect général plus imposant ni surtout plus léger. C’est là que s’arrête le souverain quand il doit faire une entrée solennelle à Moscou. J’y reviendrai, car on y a établi un spectacle d’été, planté un jardin, et bâti