Aller au contenu

Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/261

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

arrivée à Moscou, ce souvenir m’ôtait le repos. Le style de ce grotesque monument contraste d’une manière par trop bizarre avec les statues classiques des libérateurs de Moscou. Dans mes promenades, entreprises seules et au hasard, j’avais pénétré au Kremlin par des portes éloignées, de sorte que l’église à peau de serpent, autrement dite de la protection de la Vierge, monument vraiment russe, s’était toujours dérobée à mes investigations. Enfin la voilà devant moi, cette fois j’y entre, mais quel désenchantement !!… une quantité de coupoles bulbeuses, dont pas une n’est semblable à l’autre, un plat de fruits, un vase de faïence de Delft rempli d’ananas tout piqués de croix d’or, une cristallisation colossale : il n’y a pas là de quoi faire un monument d’architecture : celui-ci perd son prestige à n’être pas vu de loin. Cette église est petite comme toute église russe, à bien peu d’exceptions près ; la flèche informe ne brille que de loin, et malgré l’incompréhensible bariolage de ses couleurs, elle n’intéresse pas longtemps l’observateur attentif : deux rampes assez belles conduisent à l’esplanade sur laquelle l’édifice est construit : de cette terrasse on entre dans l’intérieur qui est resserré, mesquin, sans caractère. Cette œuvre impatientante a causé la perte de l’homme qui l’accomplit. Elle fut commandée en mémoire de la prise de Kazan, l’an-