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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/265

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dehors, le Kremlin est prodigieux ; du dedans, il est plat et commun.

Comment vous exprimer ma surprise lorsqu’en entrant dans l’intérieur de cette ville magique, je m’approchai du bâtiment moderne qu’on nomme le Trésor, et que je vis devant moi un petit palais aux angles aigus, aux lignes roides, aux frontons grecs ornés de colonnes corinthiennes ? Cette froide et mesquine imitation de l’antique à laquelle j’aurais dû être préparé, me parut si ridicule que je reculai de quelques pas, et que je demandai à mon compagnon la permission de retarder notre visite au Trésor sous prétexte d’aller admirer d’abord quelques églises. Depuis le temps que je suis en Russie, je devrais être fait à tout ce que le mauvais goût des architectes impériaux peut inventer de plus incohérent, mais cette fois la dissonance était trop criante, elle me frappa comme une nouveauté.

Nous avons donc, commencé notre revue par une visite à la cathédrale de l’Assomption. Cette église possède une des innombrables peintures de la Vierge Marie que les bons chrétiens de tous les pays attribuent à l’apôtre saint Luc. L’édifice rappelle les constructions saxonnes et normandes plutôt que nos églises gothiques. Il est l’œuvre d’un architecte italien du xve siècle ; cet artiste fut appelé à Moscou par un des grands princes, parce que les Russes d’alors ne