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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/380

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si ce n’est plus pures, à mesure que la démocratie gagne du terrain dans les constitutions, on confond ici la corruption avec les institutions libérales, et les mauvais sujets distingués y sont admirés autant que les hommes de la minorité le sont chez nous, quand ils ont du mérite. On les salue comme des libérateurs.

Le jeune prince*** n’a commencé sa carrière de libertin qu’à la suite d’un exil de trois ans au Caucase où le climat a ruiné sa santé. C’est au sortir du collége qu’il encourut cette peine pour avoir cassé des carreaux de vitre dans quelques boutiques de Pétersbourg ; le gouvernement, ayant voulu voir une intention politique dans ce désordre innocent, a fait, par son excessive sévérité, d’un étourdi encore enfant un homme corrompu, perdu pour son pays, pour sa fa mille et pour lui-même[1].

Telles sont les aberrations dans lesquelles le despotisme, le plus immoral des gouvernements, peut faire tomber les esprits.

Ici toute révolte paraît légitime, même la révolte contre la raison, contre Dieu ! Rien de ce qui sert à l’oppression n’est respectable, pas même ce qui s’appelle saint par toute la terre. Où l’ordre est oppressif, tout désordre a ses martyrs, et tout ce qui tient

  1. On m’assure que depuis mon retour en France il s’est marié et qu’il vit très-raisonnablement. (Note de l’Auteur.)