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« poète-musicien » qui grandit chaque jour. On verrait, toujours mieux, que si, « amant de la Muse plastique », Baudelaire a pu, sans s’abuser, saluer un jour Gautier pour son Maître, il n’en a pas moins marqué d’avance un revirement contre l’école qui allait sortir naturellement des livres et de l’enseignement du premier des Parnassiens.

Et pourquoi ?

Parce que, dans les Fleurs du Mal, l’image, élaborée et nourrie par quelque chose de plus intime à l’homme que n’est la raison elle-même, a reçu en outre un accompagnement musical qui lui manquait souvent chez les poètes antérieurs et presque toujours chez Gautier. C’est cet accompagnement musical, mêlé au sens rationnel jusqu’à se confondre avec lui et même à se suffire à lui-même, qui prolonge la voix du poète et lui donne cette ampleur mélodique coupée de rappels lancinants, grondements d’orgue interrompus par le son du tocsin, « le tocsin des souvenirs. »[1]

  1. Baudelaire : Œuvres posthumes. p. 81 (Mercure de France).