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Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/117

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L’HOMME

héros. Cette jeune poitrine toute résonnante encore des commandements de bataille ne palpita plus qu’en des étreintes séniles. Et dans le Louvre où erraient en peine quelques vieilles et bonnes gens, compagnons de Montluc en Italie, les plus dures images de la douleur silencieuse s’offrirent désormais au prince, parfois obligé pour joindre sa dame d’écarter les rangs de ces vieux soldats.

— Il nous oublie.

En voyant ce visage mort, cette taille gâtée de graisse, la désolation de deux yeux dont le regard las s’endormait dans les molles poches des larmiers, ils se remémoraient, songeurs, le ferme enfant qu’ils avaient connu, le lionceau de Navarre, le gasconnet gorgé de joyeux discours et d’exemples. Tous avaient honte :

— Le petit n’est qu’apparence de lui-même.

— Nous n’avons plus qu’à reculer, inutiles, jusqu’en nos manoirs, pour pendre nos épées aux crocs.

— C’est la fin.


Depuis deux ans, on ne le voyait presque plus. La méfiante promenade quotidienne, par les galeries de silence, lui devint une insupportable fatigue. Il s’enfermait avec sa maîtresse, d’autres dames, deux ou trois amis corrompus comme d’Alençon, et pendant des semaines, des mois, on ne savait rien d’eux, sinon qu’ils paillardaient et buvaient, — jusqu’à l’heure étrange où, attiré par