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Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/193

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LE CAPITAINE

— C’est entendu déjà.

— Eh bien, je les attends.

D’Aubigné sourit :

— Vous confondez l’os et la chair, sire. Je me promenais l’autre jour où ils ont coutume d’aller, aussitôt je vis à leurs mines que quelque grain les travaillait. Voici, pensai-je, de grands braves par la doublure. Je les fis tâter par mes capitaines, et aux rapports qu’ils firent je compris qu’ils avaient toujours leurs pensées méchantes.

— Que disaient-ils ?

— L’ancienne chanson : que vous êtes un homme d’imprévoyance, tout éclair et bourrasque, un parpaillot, et que nombre d’entre eux sont apostoliques, que vous récompenserez plus sûrement ceux de votre foi, que vous êtes trop brave pour admirer la bravoure et que tout haut faitsera vain qu’on accomplira devant vous. Il me semble. que ce sont là, sire, de bonnes graines de traîtres.

Le roi s’était dressé ;

— Inconstant ? oublieux ? injuste ? Bon gré ma vie ! on ne me gratte pas cette fois où la peau me démange ; fais sonner le boute-selle !

L’armée se rassembla aux trompettes, le roi frémissant y accourut au galop.

— Messieurs ! cria-t-il aux nobles, rangez-vous à gauche et à droite, le visage aux troupes. (Il tira son épée) Mestres de camp, faites faire le demi-cercle !

Rapide, le mouvement s’exécuta. Et le front