Aller au contenu

Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/270

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
250
LE ROI

son canon d’arquebuse. « Parbleu ! riait le roi de Navarre, que dira la ville de Gournay en apercevant ces fiers hommes : je la rends. » Il fit l’assaut, et après quatre heures de bataille, les gens dirent : nous la rendons. À cheval, un morceau de lard sur une croûte et le couteau à la main, le Gascon en reçut l’hommage. Le discours fut long.

— Sire, termina enfin le magistrat, veuillez prendre les clés de la ville ; nous rendons à César ce qui appartient à César.

— Ventre Saint-Gris ! rendu ? Dites qu’on me l’a vendu ! Voyez mes blessés…

Il ferma son couteau, frappa sa selle pour en faire tomber les miettes, investit la ville, et après deux jours de mal au ventre, car la pomme énervait ce buveur de vin, s’en alla devant Neuf-Chatel qu’il saisit à coups d’artillerie. Là encore les magistrats vinrent ; le roi se gratta la nuque.

— Voici l’embarras de telles affaires, dit-il à Rosny. Après avoir fait action, payé de nos personnes et reçu par les bras et réins mille écornes d’arquebusades, coups de piques et carreaux d’acier, nous faut subir les bavards. Parler, toujours parler ! la France n’est plus qu’un vaste moulin à salive.

— C’est, dit d’Aubigné, qu’on y tient en honneur la paperasserie, confondue par tous avec le savoir, comme dans les nations au déclin où y a plus de lois que d’habitants, trop pour le bien de l’État.