Aller au contenu

Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mot ou d’une simple pression de bras tandis que mentalement il suppute quels avantages il tirera des huit années de bail. De temps à autre, il se penche sur son fils et, d’une voix que le bonheur fait trembler :

— Je crois que ce sera une belle affaire, Maurice !…

Ils descendent le boulevard Barbès. Ils s’avancent de front sur cet asphalte qui est leur sol natal. De front, unis, et le monde s’ouvre devant leurs espérances. Leurs yeux luisent. Qu’il fait bon vivre un soir comme celui-ci, à l’heure où s’allument les réverbères, les rampes électriques et les enseignes et les devantures chatoyantes. Tout est oublié des anciennes rigueurs… Louise s’imagine déjà devant les soldes de « La Maison Dorée », les doigts pris dans les flots d’étoffe. Elle s’arrête, les battements de son cœur la bouleversent. Lecouvreur, lui, voudrait confier sa joie à tous. Il ne va pas se mettre à chanter, à courir sur le trottoir, à serrer sa femme dans ses bras.

Il s’écrie :

— On dîne au restaurant !

Cette décision imprévue les enchante. Mais où iront-ils ? Leur enthousiasme est troublé