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Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/224

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agite son trousseau de clés, ouvre les chambres une à une, et bâcle son travail. Elle balaie, « secoue les puces » aux traînards ; de ses longs bras ouverts comme des cisailles, elle retourne un matelas ; lave les cabinets en y lançant de grands coups d’eau à la volée. Puis s’arrête.

— S’agit pas que je me crève, grogne-t-elle, en s’asseyant sur toutes les chaises qu’elle rencontre.

Dès que les clients sont partis, elle se sent chez elle ; elle peut fouiner à l’aise. Elle plante là son matériel. L’oreille tendue sur les bruits de l’escalier, elle s’attarde dans les chambres des jeunes gens, lit la correspondance, ouvre les armoires, les tables de nuit, et y fait des découvertes : fioles, cartes à jouer, peignes crasseux, souvenirs de toutes sortes qui puent le tabac, la pharmacie et la punaise écrasée. De là, elle passe chez les femmes, chez la belle Raymonde, chez Fernande. « Quelles putains, » marmonne-t-elle en regardant leurs robes. Dans les tiroirs gluants : des bâtons de rouge, des flacons, des démêlures de cheveux, de la vaseline, de l’ouate… Elle ricane : « Et le reste… » Partout la même chose, du linge à ne pas toucher avec des pincettes. Elle connaît en