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Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/222

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L. H. DANCOURT

regretter le loiſir qu’ils ſont forcés de donner à la réparation de leurs forces & de la tête & de l’eſprit. Sulli bien loin de penſer comme vous ſe ſeroit emporté contre quelqu’un qui auroit propoſé l’établiſſement d’un Bal public : Il auroit vû dans cet établiſſement tous les préjudices que vôtre préviſion fait marcher à la ſuite du ſpectacle. Sulli n’auroit pas manqué de dire : Je vois que les travaux des Genevois ceſſant d’être leur amuſement, auſſitôt qu’ils auront un Bal public, il y aura chaque jour un tems réel de perdu pour ceux qui aſſiſteront à ce Bal, & l’on ne ſe remettra pas à l’ouvrage, l’eſprit rempli de ce qu’on aura vû ou de ce qu’on aura fait ; on en parlera, ou l’on y ſongera, par conſéquent relachement de travail, premier préjudice.

Quelque peu qu’il en coûte pour ſon Écot, on paiera enfin : c’eſt toujours une dépenſe qu’on ne faiſoit pas. Il en coûtera pour ſoi, pour ſa femme, pour ſes enfans, quand on les y menera, & il faudra les y mener ſouvent par ordre du Seigneur Commis : de plus un Ouvrier ne va point dans une Aſſemblée ſe montrer en habit de travail, il faudra prendre plus ſouvent ſes habits de Dimanche, changer de linge plus ſouvent, ſe poudrer, ſe raſer ; tout cela coûte du tems & de l’argent. Augmentation de Dépenſe, deuxième préjudice.

Un travail moins aſſidu & une dépenſe plus forte, exigent un dédomagement, on le trouvera ſur le prix des ouvrages qu’on ſera forcé de rencherir. Pluſieurs marchands rebutés de cette aug-