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Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/294

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l’immense valeur des engins à son service, la nation doit nécessairement renoncer à ses dispositions plus ou moins belliqueuses, et s’abandonner sans réserves à la bienfaisante tutelle du Pouvoir civil.

C’est le triomphe des pékins. Des voyous, ainsi que dit mon père dans une lettre qu’il vient de m’adresser et où, à l’occasion de l’avènement de l’Empereur Guillaume II, le 15 juin 1888, il m’assure que les sentiments intimes du nouveau monarque allemand sont aussi pacifiques que ceux de nos gouvernants. Mon père semble très au courant de la politique étrangère. Je soupçonne la baronne de Haulka de lui faire de fréquentes visites. Peut-être même s’est-elle installée à L. Je ne suis sûr de rien. Mon père m’apprend qu’il espère revenir à Paris avant peu. Les sentiments patriotiques de la ville de L. sont, dit-il, des plus douteux ; pourtant, elle possède une Société de tir à l’arbalète rayée qui vient de le nommer président d’honneur. « Voilà enfin une présidence, écrit-il ; qui sait ? peut-être un acheminement à la présidence du Conseil. » Mon père serait-il devenu ambitieux ?



Pour moi, je dois avouer que l’ambition me fait peur. D’abord, elle menace mon indifférence générale et ma paresse d’esprit ; elle effraye mon scepticisme, ce compagnon complaisant dont le sourire toujours prêt décourage les provocations de l’effort. Ensuite, j’ai pu me rendre compte récemment des terribles exigences de l’ambition et de la difficulté que des imbéciles mêmes, que ne gêne aucune idée, éprouvent à les satisfaire ; de plus, il m’est donné de constater tous les jours quels épouvantables ravages elle peut exercer dans une âme bien trempée lorsque les moyens de l’assouvir ont disparu sans espoir.

Le général de Porchemart se meurt. Ce qui le tue, ce