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Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/412

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tranquillement son apéritif avec Ranc, en père peinard.

Avant de mourir, Delanoix a donné une irréfutable preuve de sa vertu intransigeante. Il a déshérité sa fille dans toute la mesure du possible et m’a institué son légataire. J’ai accepté la succession, bien entendu ; et j’ai chargé du soin de mes intérêts Me Lerequin, l’avoué dont m’avait parlé Gédéon Schurke.

Un samedi, tout à la fin du mois de juin, les époux Raubvogel comparaissent devant le tribunal. Le mari est condamné à plusieurs années de prison ; la femme est acquittée. Qu’on châtie Raubvogel, soit ; mais les intérêts de la France seraient bien mieux servis si, au lieu de le condamner pour espionnage, on le punissait pour avoir appartenu à ces absurdes sociétés patriotiques, à ces honteuses ligues qui se sont fait un monopole de la Revanche et l’ont tuée sous l’excès du ridicule. Quant à Mme Raubvogel, je dois dire… Mais pourquoi m’occuper d’une femme que je ne reverrai jamais ?



Le lendemain, dimanche, une paresse sans cause, mais invincible, me retient au lit. J’ai renvoyé mon ordonnance et lui ai dit de ne pas revenir avant midi ; là-dessus, je me suis rendormi du sommeil du juste.

Il est environ neuf heures lorsqu’un coup de sonnette me réveille en sursaut. Qui peut venir ?… Ah ! que je suis sot ! C’est Bellevigne qui m’a promis de m’apporter des billets pour un concert d’orgue, au Trocadéro. Je saute à terre, je traverse en courant (et en bannière) le petit salon qui précède ma chambre à coucher, je tourne la clef de la porte de l’appartement, je crie : « Entrez ! » et je reviens en toute hâte me mettre au lit. J’entends la porte s’ouvrir et se refermer, des pas pressés dans le salon, et tout d’un coup…