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Page:Darwin (trad. Barbier) — Les plantes insectivores, 1877.pdf/113

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EFFETS DES LIQUIDES AZOTÉS.

remarque de Gerhardt[1] que les pois contiennent de la légumine « combinée avec un alcali formant une solution qui ne se coagule pas » et que cette solution se mêle à l’eau bouillante. Je puis ajouter, relativement aux expériences qui précèdent et à celles qui vont suivre, que, selon Schiff[2], il existe certaines formes d’albumine qui ne se coagulent pas dans l’eau bouillante, mais qui se convertissent en matières solubles.

Dans trois occasions, je fis bouillir dans de l’eau distillée, pendant une heure et un quart, des feuilles de chou hachées[3] ; en décantant la décoction après l’avoir laissé reposer, j’ai obtenu un liquide vert pâle sale. Je plaçai sur 13 feuilles des gouttes ayant le volume de toutes celles dont je me suis servi dans ces expériences. Les tentacules et les feuilles elles-mêmes s’infléchirent d’une façon extraordinaire au bout de quatre heures. Le lendemain le protoplasma des cellules des tentacules était complètement agrégé. Je posai aussi des gouttes très-petites de la décoction sur la sécrétion visqueuse qui entoure les glandes des tentacules ; ces tentacules s’infléchirent au bout de quelques minutes. Ce liquide exerçant une action si énergique, je retendis de 3 parties d’eau et je plaçai une goutte du liquide étendu sur le disque de 5 feuilles ; l’action fut si violente que, le lendemain matin, ces feuilles s’étaient complètement repliées sur elles-mêmes. Nous sommes donc autorisés à conclure qu’une décoction de feuilles de chou est tout aussi énergique qu’une infusion de viande crue.

Je plaçai une quantité égale de feuilles de chou hachées et d’eau distillée dans un endroit chaud et je laissai infuser pendant vingt heures, mais sans porter le liquide au point d’ébullition. Je plaçai des gouttes de cette infusion sur 4 feuilles. Au bout de vingt-trois heures, l’une de ces feuilles s’était considérablement infléchie ; une seconde légèrement ; chez la troisième je n’observai que l’inflexion de quelques tentacules sous-marginaux et la quatrième ne fut affectée en aucune façon. La puissance de l’infusion est donc beaucoup moins considérable que celle de la décoction : il est évident, en effet, que l’immersion, pendant une heure, des feuilles de chou dans de l’eau bouillante doit amener l’extraction beaucoup plus efficace des substances qui excitent le Drosera, qu’une immersion dans de l’eau tiède prolongée pendant plusieurs heures. Cela tient peut-être, ainsi que l’a fait remarquer Schiff pour

  1. Watts, Dict. of Chemistry, vol. III, p. 568.
  2. Leçons sur la phys. de la digestion, tome I, p. 379 ; tome II, p. 154, 166, sur la légumine.
  3. J’employai des feuilles cueillies avant la formation du cœur ; ces feuilles contiennent 2,1 p. 100 de matières albumineuses ; les feuilles externes de la plante complètement développée n’en contiennent que 1,6 p. 100. Watts, Dict. of Chemistry, vol. I, p. 653.