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Page:Daudet – Les Rois en exil – Éditons Lemerre.djvu/216

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trépignait, frémissait dans la voiture ; il aurait voulu descendre, se rouler avec les autres sur les pelouses, monter dans les barques.

Maintenant, le landau arrivait à des allées moins bruyantes, où des gens lisaient, dormaient sur des bancs, où passaient le long des massifs des couples étroitement serrés. Ici l’ombre gardait un peu de mystère, une fraîcheur de source, de vraies effluves de forêt. Des oiseaux pépiaient dans les branches. Mais à mesure qu’on s’éloignait du lac, qui concentrait tous les bruits, l’écho d’une autre fête arrivait distinctement : coups de feu, roulements de caisses et de tambours, sonneries de trompettes et de cloches, se détachant d’une grande clameur qui tout à coup passait sur le soleil comme une fumée. On eût dit le sac d’une ville.

— Qu’est-ce que c’est ?… Qu’est-ce qu’on entend ? demandait le petit prince.

— La foire aux pains d’épices, Monseigneur, dit le vieux cocher, se retournant sur son siège ; et comme la reine consentait à se rapprocher de la fête, la voiture sortie du parc fila par une foule de ruelles, de voies à demi-construites, où des maisons neuves à six étages montaient à côté de misérables taudis, entre un ruisseau d’étable et le jardin d’un maraîcher. Partout des guinguettes avec leurs tonnelles, les petites tables, les montants de la balan-