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Page:Daudet – Les Rois en exil – Éditons Lemerre.djvu/350

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qué cette bonne partie de fous… Heureux prince d’Axel ! Brouillé avec le roi, son oncle, chassé de son pays par toutes sortes d’intrigues de cour, il ne régnerait peut-être jamais, puisque le vieux monarque parlait de se remarier avec une jeune femme et d’engendrer une foule de petits présomptifs. Mais tout cela ne l’inquiétait pas le moins du monde. Faire la fête à Paris lui paraissait autrement intéressant que de faire là-bas de la politique. Et peu à peu la blague, la raillerie sceptique, reprenaient Christian étendu sur le divan où le prince royal avait laissé la marque de sa veulerie contagieuse. Dans l’atmosphère désœuvrée du club, tout apparaissait au jeune roi, l’entraînement héroïque de la veille et la tentative de demain, sans gloire, sans magie ni grandeur. Positivement il se décomposait en restant là ; et, pour échapper à cette torpeur qui l’envahissait comme un poison stupéfiant dans toutes ses veines, il se leva, descendit au grand air des vivants, des actifs, des circulants.

Trois heures. L’heure à laquelle, d’ordinaire, il se dirigeait vers l’avenue de Messine, après avoir déjeuné au cercle ou chez Mignon. Machinalement ses pas prirent la route habituelle dans ce Paris d’été un peu plus grand, un peu moins capiteux que l’autre, mais qui compose de si charmants aspects, des perspectives allégées, avec ses verdures massées contre des