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Page:Daudet – Les Rois en exil – Éditons Lemerre.djvu/391

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LES ROIS EN EXIL

un joli petit poney, rien que pour moi… C’est le général qui m’apprendra à monter, et puis maman aussi. » Près de lui, on s’empressait, on s’inclinait avec des regards d’adoration, pendant que Christian, un peu seul, abandonné, ressentait une impression étrange, indéfinissable, comme un allègement autour du crâne, le froid de sa couronne enlevée. Positivement la tête lui tournait. Pourtant il avait bien désiré cette heure, maudit plus que tout autre les responsabilités de sa situation. Alors pourquoi ce malaise, cette tristesse, maintenant qu’il voyait fuir le rivage devant lui, la route s’écarter sur d’autres perspectives ?

— Eh bien ! mon pauvre Christian, je crois qu’on vient de vous le donner votre ouistiti…

C’était le prince d’Axel qui, tout bas, le consolait à sa manière.

— Vous avez de la veine, vous… C’est moi qui serais heureux s’il m’en arrivait autant, si l’on me dispensait de quitter ce joli Paris pour aller régner sur mon peuple de phoques à ventre blanc !…

Il continua un moment du même ton ; puis tous deux disparurent, profitant du tumulte, de l’inattention de l’assemblée. La reine les vit sortir, entendit rouler dans la cour le phaéton dont les roues légères ne s’éloignaient jadis qu’en lui passant sur le cœur… Mais que lui importait maintenant ? Ce n’était plus le roi