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Page:Daudet - Jack, II.djvu/16

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sion, d’une chaleur de cœur extraordinaire, offrit son amitié au Nantais, qui l’accepta avec reconnaissance, et, devenu son ami, il crut pouvoir lui donner quelques conseils :

— Voulez-vous que je vous dise une chose, Nantais ?… Eh bien !… croyez-moi… ne jouez plus.

Le coup était droit et dut porter, car le dessinandier eut un mouvement nerveux dans les lèvres (l’émotion sans doute) et avala son verre d’eau-de-vie précipitamment. Jack, voyant l’effet qu’il produisait, ne s’en tint pas là :

— Et puis, tenez, il y a encore une autre chose que je veux vous dire…

Heureusement que la voix du cabaretier l’interrompit, car pour le coup le Nantais aurait eu beaucoup de peine à cacher ses impressions.

— Hé ! les gas ! voilà la cloche.

Dans l’air froid du matin, un tintement monotone et sinistre se mêlait à un mouvement de foule muette, à des tousseries, des claquements de sabots, le long des rues montantes.

— Allons, dit Jack, il faut partir.

Et comme son ami avait payé les deux premières tournées, il tint absolument à régler la troisième, heureux de tirer un louis de sa poche et de le jeter sur le comptoir en disant : « Payez-vous. »

— Bigre ! un jaunet… fit le marchand peu habitué à voir de pareilles pièces sortir des poches d’un ap-