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Page:Daudet - La doulou (la douleur) 1887 - 1895 ; Le trésor d’Arlatan (1897), 1930.djvu/42

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Une ombre à côté de moi rassure ma marche, de même que je marche mieux près de quelqu’un.

Quelquefois je me demande si ce n’est pas aux inoculations de Pasteur que je devrais recourir, tellement je sens dans ces douleurs suraiguës, ces torsions, ces secouées furieuses, ces crispations de noyé, une analogie avec l’accès rabique. Oui, en haut de la maladie nerveuse, l’échelon suprême, son couronnement — la rage.

Nerveux, méchant depuis le matin. Et puis Julia me déchiffre un cahier de musique tzigane. Dehors, l’orage, grêle, tonnerre — détente.

Un moment humilié de me voir un simple baromètre, engainé de verre, gradué. Je me console en songeant que dans ce baromètre-là les influences atmosphériques déterminent autre chose qu’une montée de mercure. Tant d’idées m’affluent au cerveau, et j’ai découvert une ou deux petites lois humaines, — de celles qu’il vaut mieux garder pour soi.

Remis au travail doucement. Très content de l’état du cerveau. Des idées toujours, la formule assez commode aussi, mais — il me semble — plus de peine à coordonner. Peut-être aussi l’habitude perdue, car voilà six mois que l’usine chôme, et que les grandes cheminées ne tirent plus.