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Page:Daudet - La doulou (la douleur) 1887 - 1895 ; Le trésor d’Arlatan (1897), 1930.djvu/47

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« De tous les instants de ma vie. » Je peux dater ma douleur comme Mlle de Lespinasse datait son amour.

Depuis que je sais que c’est pour toujours — un toujours pas très long, mon Dieu ! — Je m’installe et je prends de temps en temps ces notes avec la pointe d’un clou et quelques gouttes de mon sang sur les murailles du carcere duro.

Tout ce que je demande, c’est de ne pas changer de cachot, de ne pas descendre dans un des in pace que je connais, là-bas où il fait noir, où la pensée n’est plus.

Et pas une fois, ni chez le médecin, ni à la douche, ni dans les villes d’eau où la maladie se traite, son nom, son vrai nom prononcé, « maladie de la moelle » ! Les livres scientifiques même s’intitulent « Système nerveux » !

Il Crociato. Oui, c’était cela, cette nuit. Le supplice de la Croix, torsion des mains, des pieds, des genoux, les nerfs tendus, tiraillés à éclater. Et la corde rude sanglant le torse, et les coups de lance dans les côtes. Pour apaiser ma soif sur mes lèvres brûlées dont la peau s’enlevait, desséchée, encroûtée de fièvre, une cuillerée de bromure