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Page:Daudet - Le drame de Jules Soury, paru dans L'Action française, 02-02-1939.djvu/3

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Il m’apporta, dans les mêmes conditions, à une heure moins tardive, le même ouvrage. Ma femme et moi le vîmes entrer, son chapeau à la main, car il ne voulait se débarrasser d’aucun pardessus entre les mains de la plus modeste servante. Reçu par nous dans notre petit salon, il commença un discours interminable sur les rapports de la science et de la raison, où il y avait beaucoup de bon, et pas mal de grisaille. Cela fait, et comme nous commencions à nous endormir, il salua cérémonieusement et s’en fut. Son bouquin, compact et savant, était d'un primarisme supérieur, et, comment dire, étoilé. Jules Soury avait tout lu, tout compris, tout absorbé, mais il en était demeuré au quantitatif, comme un cartésien transplanté, comme un cartésien de serre. Il nous avait tenus ainsi de dix heures et demie à deux heures du matin. Nous étions, il faut le dire, habitués à ces exercices par notre cher ami, le colonel Marchand, qui, lui, avait cette marotte : le vote familial.