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Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/56

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En même temps que les braves habitants de Tarascon se passaient ainsi toutes leurs fantaisies d’installations idéales, les articles du Forum et du Galoubet étaient reproduits dans tous les journaux du Midi, les villes, les campagnes inondées de prospectus à vignettes encadrés de palmiers, de cocotiers, bananiers, lataniers, toute la faune exotique ; une propagande effrénée s’étendait sur la Provence entière.

Par les routes poudreuses des banlieues de Tarascon passait au grand trot le cabriolet de Tartarin, conduisant lui-même avec le Père Bataillet assis près de lui sur le devant, serrés l’un près de l’autre pour faire un rempart de leurs corps au duc de Mons, enveloppé d’un voile vert et dévoré par les moustiques, qui l’assaillaient rageusement de tous côtés, en troupes bourdonnantes, altérés du sang de l’homme du Nord, s’acharnant à le boursoufler de leurs piqûres.

C’est qu’il en était, du Nord, celui-là ! Pas de gestes, peu de paroles, et un sang-froid !… Il ne s’emballait pas, voyait les choses comme elles sont, posément. On pouvait être tranquille.

Et sur les placettes ombragées de pla-