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Page:David - Les Patriotes de 1837-1838, 1884.djvu/187

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les patriotes

Nelson se voyant abandonné de tout le monde, et sachant que les troupes anglaises ne tarderaient pas à venir à Saint-Denis, se décida à partir pour les États-Unis. Triste situation que celle où il se trouvait en ce moment !

Il lui fallait briser tous les liens qui l’attachaient à son pays, à l’endroit en particulier où il avait vécu dans le bonheur et la prospérité, se séparer de tout ce qu’il aimait, laisser sa famille et ses biens à la merci de la haine et de la vengeance de ses ennemis.

Mais c’est un peu l’histoire de tous ceux qui se jettent dans les hasards des révolutions, dans les nobles luttes du droit contre la force. La fortune inconstante les conduit, du jour au lendemain, du Capitole à la Roche tarpéienne, de la gloire à l’humiliation. Les vainqueurs d’hier, proscrits aujourd’hui, ne trouvent plus sur ce sol de la patrie qu’ils aimaient tant, un pied de terre où ils soient en sûreté ; souvent on les voit parcourir, tristes et désolés, les pays étrangers et traîner misérablement, loin de la patrie, les restes d’une existence brisée.

Nelson se dirigea donc du côté de la frontière. C’était dans les derniers jours de novembre. Le temps était froid, les chemins impraticables, les cantons de l’Est parcourus en tous sens par des bandes de volontaires qui brûlaient du désir de mettre la main sur les chefs des rebelles, sur ceux dont la tête était mise à prix.

Pendant quinze jours, il eut à supporter toutes les tortures du froid, de la faim et de l’inquiétude, marchant la nuit à travers les bois, dans l’eau et la boue jusqu’aux genoux, se cachant le jour, obligé quelquefois de revenir sur ses pas pour ne point tomber au pouvoir des volontaires, d’avoir recours à toute espèce de subterfuges pour se procurer un peu de vivres. Une couple de fois, il faillit périr en traversant des ruisseaux ou des marais.

Le douze décembre, des volontaires le rencontrè-