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Page:David - Les Patriotes de 1837-1838, 1884.djvu/238

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les patriotes

Nous avons entendu un protestant intelligent et impartial dire :

« Pour vivre, je préfère être protestant, mais pour mourir j’aimerais mieux, il me semble, être catholique. »

Si c’est vrai dans les cas ordinaires, c’est encore beaucoup plus vrai dans des circonstances terribles comme celles où se trouvaient Cardinal et Duquet. La religion catholique seule peut alors, avec ses augustes sacrements, offrir à l’âme les consolations et la force dont elle a besoin.

Le 21 décembre arriva. Jour sinistre qui vit pour la première fois au Canada la tyrannie immoler sur l’échafaud les martyrs de la liberté !

Duquet avait peu dormi ; il était très-pâle, très-abattu et paraissait faible. Il parlait peu et faisait machinalement tout ce qu’on lui ordonnait.

Il avait l’air de l’agneau qu’on traîne à la boucherie.

Ses forces ne l’abandonnèrent pas, pourtant ; il marcha d’un pas ferme à l’échafaud, ayant à ses côtés son confesseur, M. l’abbé Labelle, curé de Châteauguay.

Sa jeunesse, son air maladif, sa figure empreinte de douleur, de résignation et de dignité, touchèrent profondément toutes les personnes présentes, même ses bourreaux.

Pauvre enfant ! l’échafaud lui fit peur ; il ne put s’empêcher de frémir quand il en gravit la première marche. Il l’aurait beaucoup plus redouté s’il avait prévu le supplice qui l’attendait. C’est vite fait généralement, comme disait l’héroïque de Lorimier ; mais pour l’infortuné Duquet ce fut long.

Lorsque la trappe tomba, la foule assista à un spectacle horrible. La corde, mal ajustée, s’étant dérangée, on vit le corps de l’infortuné jeune homme aller de droite à gauche et frapper violemment la charpente ferrée de l’échafaud.