Aller au contenu

Page:David - Les Patriotes de 1837-1838, 1884.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
50
les patriotes

quelque temps ; mais leurs balles se perdirent et ils furent bientôt enveloppés dans un nuage de fumée entre les murs qui croulaient, au milieu d’une grêle de balles qui leur arrivait de partout.

Les troupes s’étant emparées du presbytère, un poêle qui se trouvait au milieu de la grande salle fut renversé ; le feu prit et, dans un instant, tout fut en flammes. Chénier et ses hommes continuaient de se défendre avec plus d’énergie que d’effet, tirant plus ou moins au hasard du clocher et des fenêtres de l’église.

On peut se faire une idée de ce que ces pauvres gens devaient éprouver. Ils avaient vu s’écrouler au milieu des flammes tous les édifices où leurs compatriotes se défendaient ; ils avaient entendu les cris des blessés et des mourants ; ils avaient vu dévorer par les flammes ceux que les balles ou les baïonnettes avaient épargnés. Entourés de tous côtés, ils savaient bien que le même sort les attendait. Plusieurs voulurent s’enfuir en se jetant par les fenêtres du côté de la rivière, mais la plupart furent tués en sautant. Bientôt il ne resta plus autour du Dr Chénier qu’une poignée de braves qui, imitant l’héroïsme de leur chef, se battaient en désespérés.

Le feu était à l’église et les flammes se propageaient avec rapidité.

Chénier se décida à sortir. Il fit appel à ses gens et leur dit de le suivre, qu’il fallait essayer de passer au travers de l’ennemi. Il sauta avec eux par les fenêtres du côté du couvent, et s’élança, son fusil à la main, vers la porte du cimetière. Une balle le jeta par terre ; il se releva sur un genou, fit feu sur les Anglais, et reçut une autre balle en pleine poitrine, au moment où il essayait de recharger son fusil. Le brave Chénier tomba pour ne plus se relever.

Soixante-dix patriotes périrent par le fer et le feu, la plus grande partie du village fut consumée. Du