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Page:David - Les Patriotes de 1837-1838, 1884.djvu/56

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les patriotes

aux troupes envoyées pour l’arrêter. Il aurait été si facile de surprendre les troupes sur le chemin, de briser la glace sous leurs pieds, ou bien encore de faire en face de l’église de Saint-Eustache des terrassements qui, joints aux maisons avoisinantes, auraient formé un système de défense formidable.

Mais n’oublions pas que les conseils du curé et du vicaire de la paroisse et l’exemple de quelques-uns des chefs avaient réduit le nombre des patriotes à une poignée d’hommes, que Chénier, improvisé général au dernier moment, lorsque le canon déjà se faisait entendre, eut à peine le temps de se renfermer dans l’église avec les braves restés autour de lui pour partager son sort.

Plus on critique la conduite de ces braves gens au point de vue de l’art militaire et même des plus simples règles de la prudence, plus on doit au moins rendre hommage à leur valeur, à leur indomptable énergie. Aussi, Saint-Eustache sera toujours un lieu sacré pour ceux qui croient que le mérite des actions n’est pas dans le succès, mais dans la sincérité des motifs, la noblesse des convictions et la grandeur du dévouement.

L’étranger lui-même ne peut passer devant la vieille église qui fut le théâtre de la lutte que nous venons de raconter sans s’arrêter, sans contempler avec respect les cicatrices des blessures que les boulets de Colborne lui ont faites en 1837. L’indifférent veut voir l’endroit où Chénier est tombé. Comment les Canadiens-français pourraient-ils jamais oublier de mentionner parmi les souvenirs qui honorent leur nationalité Saint-Eustache et Chénier ?