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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/109

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régalé le public de différentes bribes des autres Odes qui ont paru les moins mauvaises. Il a fait ensuite ce qu’on peut appeler la parade. Il a lu une suite des Réflexions sur la poésie et sur l’Ode en particulier[1] : de mauvaises plaisanteries mêlées de beaucoup d’amertume, faisaient tout le fond de sa dissertation. Elle a fait rire à gorge déployée.

On a annoncé pour sujet du prix de l’année prochaine l’Éloge de M. le duc de Sully, surintendant des finances. On a battu des mains à cette annonce, et quelqu’un a dit avec esprit : « Voilà l’Éloge fait. »

M. Saurin a fini la séance par la lecture du premier acte d’une tragédie, à laquelle il travaille : c’est un sujet tiré de l’anglais[2], intitulé dans l’original, Tancrède et Sigismonde. Il a changé ces noms en ceux de Blanche et de Guiscard. Les huées soutenues ont empêché d’entendre cette lecture, qui ne promettait rien de satisfaisant, l’auteur n’étant pas un grand tragique. Le ton déclamatoire et l’enthousiasme avec lequel il a débité cette drogue, a beaucoup fait rire : il ne s’est point décontenancé de cet accueil peu favorable, et a fini son acte jusqu’au dernier vers, sans doute sans s’apercevoir du mauvais succès qu’il avait[3].

26 — Hier, dans la séance de l’Académie, on lut une Ode sur la patience, où il y avait des idées, du sentiment et de la philosophie. Elle était peu lyrique. On la donna

  1. Le 25 août 1760, d’Alembert avait lu, à la séance publique de l’Académie Française, des Réflexions sur la poésie, que l’on trouve ainsi que la Suite dont parlent les Mémoires dans le cinquième volume de ses Mélanges de littérature — R.
  2. De Thompson, qui lui-même avait mis à contribution un épisode du roman de Gil Blas, le Mariage par vengeance. — R.
  3. V. 26 septembre 1763. — R.