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Page:De Banville - Odes Funambulesques.djvu/105

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Et les rivaux honteux que la haine te donne
Lorsque ta voix sublime à la fin t’abandonne,
Toujours maître de toi, tu luttes en héros,
Toujours roi, toujours fort, tandis que tes bourreaux
Inventent vingt ténors devant qui l’on s’incline,
Et qui durent un an, comme la crinoline.
   Ah ! du moins nous avons la Danse, un art divin !
Et l’homme le plus fait pour être un écrivain,
Célébrât-il Louis et portât-il perruque,
Fût-il Caton, fût-il Boileau, fût-il eunuque,
Ne pourrait découvrir l’ombre d’un iota
Pour défendre à ses vers d’admirer Carlotta.
Son corps souple et nerveux a de suaves lignes ;
Vive comme le vent, douce comme les cygnes,
L’aile d’un jeune oiseau soutient ses pieds charmants,
Ses yeux ont des reflets comme des diamants,
Ses lèvres à l’Éden auraient servi de portes ;
Le jardin de Ronsard, de Belleau, de Desportes,
Devant Cypre et Chloris toujours extasiés,
A, pour les embellir, donné tous ses rosiers.
   Elle va dans l’azur, laissant flotter ses voiles,
Conduire en souriant la danse des étoiles,
Poursuivre les oiseaux et prendre les rayons ;
Et, par les belles nuits, d’en bas nous la voyons,