ceux qui craignent sa colère se retirent. Je demeurerai, n’ayant nul moyen de vivre sans son secours.
— Philippe peut se venger cruellement, dit le Taiſeux.
— J’ai confiance, répondit d’Egmont.
— La tête y compriſe ? demanda Ludwig de Naſſau.
— Y compris, répondit d’Egmont, tête, corps & dévouement, qui sont à lui.
— Amé & féal, je ferai comme toi, dit de Hoorn.
Le Taiſeux dit : — Il faut prévoir & ne point attendre.
Lors, meſſire d’Egmont parlant violemment : — J’ai, dit-il, fait pendre à Grammont vingt-deux réformés. Si les prêches ceſſent, si l’on punit les abatteurs d’images, la colère du roi s’apaiſera.
Le Taiſeux répondit :
— Il eſt des eſpérances incertaines.
— Armons-nous de confiance, dit d’Egmont.
— Armons-nous de confiance, dit de Hoorn.
— C’eſt de fer qu’il faut s’armer & non de confiance, repartit d’Hoogſtraeten.
Sur ce, le Taiſeux fit signe qu’il voulait partir.
— Adieu, prince sans terre, dit d’Egmont
— Adieu, comte sans tête, répondit le Taiſeux.
Ludwig de Naſſau dit alors : — Le boucher eſt pour le mouton & la gloire pour le soldat sauveur de la terre des pères !
— Je ne le puis, ni ne le veux, dit d’Egmont.
— Sang des victimes, dit Ulenſpiegel, retombe sur la tête du courtiſan !
Les seigneurs se retirèrent.
Ulenſpiegel alors deſcendit de sa cheminée & alla incontinent apporter les nouvelles à Praet. Celui-ci dit : « D’Egmont eſt traître, Dieu eſt avec le prince. »
Le duc ! le duc à Bruxelles ! Où sont les coffres-forts qui ont des ailes ?