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Page:De Gaspé - Les anciens canadiens, 1863.djvu/8

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LES ANCIENS CANADIENS

volume, finissent, après avoir franchi tous les obstacles, par disparaître à leurs yeux, et aller se perdre dans l’immense fleuve Saint-Laurent. Un poète, qui fait son profit de tout, contemplant, les bras croisés, cette scène d’un air rêveur, et suivant la descente des petits glaçons, leurs temps d’arrêts, leurs ricochets, les eût comparé à ces hommes ambitieux arrivant, après une vie agitée, au terme de leur carrière, aussi léger d’argent que de réputation, et finissant par s’engloutir dans le gouffre de l’éternité.

Les maisons qui avoisinent le marché sont, pour la plupart, à un seul étage, à l’encontre de nos constructions modernes, qui semblent vouloir se rapprocher du ciel, comme si elles craignaient un autre déluge.

Il est midi : l’Angélus sonne au beffroi de la cathédrale ; toutes les cloches de la ville annoncent la salutation que l’ange fit à la mère du Christ, la patronne chérie du Canadien. Les habitants[1] en retard, dont les voitures entourent les boucheries, se découvrent et récitent dévotement l’Angelus. Tout le monde pratiquant le même culte, personne ne tourne en ridicule cette coutume pieuse.

Certains chrétiens du dix-neuvième siècle semblent avoir honte d’un acte religieux devant autrui : c’est faire, pour le moins, preuve d’un esprit rétréci ou de pusillanimité. Les disciples de Mahomet, plus courageux, prient sept fois par jour, en tous lieux, en présence des timides chrétiens.

Les élèves du collége des Jésuites, toujours si bruyants lorsqu’ils entrent en récréation, sortent silencieux de l’église, d’où ils viennent de prier. Pour-

  1. Habitant est synonyme de cultivateur, en Canada.