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Page:De Gaspé - Les anciens canadiens, 1863.djvu/95

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UN SOUPER CHEZ UN SEIGNEUR CANADIEN.

prends de jolies choses : une conduite certainement bien édifiante, pour un élève des révérends pères Jésuites !

— Vous voyez bien, M. l’abbé, dit Jules, que tout cela n’était qu’histoire de rire, pour prendre part à la joie de cette estimable famille. Je connaissais trop la vertu féroce, solide sur ses bases comme le Cap des Tempêtes, de ces filles de marin, pour agir sérieusement. Je savais qu’après avoir lâché leur double bordée de soufflets, elles fileraient ensuite toutes voiles au vent.

— Je commence à croire, après tout, fit le vieux pasteur, que tu dis la vérité : que c’était plutôt espièglerie de ta part, que mauvaise intention : je connais mon Jules d’Haberville sur le bout de mon doigt.

— De mieux, en mieux, dit le capitaine ; prenez maintenant sa part : il ne manquait plus que cela. Nous allons voir pourtant si vous serez aussi indulgent pour le reste. Quand monsieur eut fini son sabbat, il dit à ma femme : le capitaine m’a chargé de vous dire qu’il serait ici demain, vers dix heures du soir ; et, comme il a fait de bonnes affaires (ce qui était après tout vrai), il entend que tous ses amis se ressentent de son bonheur. Il veut qu’il y ait bal et souper chez lui à son arrivée, qui sera vers l’heure où on se mettra à table. Ainsi préparez tout pour cette fête, à laquelle il m’a invité avec mon frère de Locheill. Ça me contrarie un peu, ajouta l’hypocrite, j’ai bien hâte de revoir mes chers parents, mais pour vous, mesdames, il n’y a rien que je ne fasse.

— Mais mon mari n’y pense donc pas, de me donner si peu de temps, dit madame Marcheterre. Nous n’avons point de marché ici ! ma cuisinière est bien