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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/278

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près de la porte du Palais. Notre amphytrion possédait une excellente lanterne magique et, trouvant la nuit favorable, fit paraître sur le mur opposé et récemment blanchi à la chaux, un magnifique navire toutes voiles déployées. La sentinelle surprise d’un spectacle si merveilleux au milieu d’une ville, crie de toutes ses forces : « sortez, gardes ! »

Tout le poste sort, croyant que c’était un officier faisant sa ronde de nuit, lorsque la sentinelle leur crie : « venez voir un navire qui descend la côte à pleines voiles. »

Tout le poste descend, mais le navire avait disparu. Le sergent, croyant à une mystification, réprimanda vertement la pauvre sentinelle, qui jurait ses grands dieux qu’elle avait vu un navire.

À peine le poste était-il rentré dans le corps de garde, que le même objet apparaît de nouveau : et la sentinelle de crier comme de plus belle, qu’elle voit encore le navire. Bref ; le sergent indigné, après une troisième alerte, prend le parti de faire relever la sentinelle la croyant frappée tout à coup d’aliénation mentale.

Nous entendîmes, quelques minutes après, au haut de la côte du Palais, la voix d’un charretier qui, debout dans sa charrette, chantait à tue-tête une joyeuse chanson canadienne. Mais à peine est-il au milieu de la côte, qu’il pousse un cri lamentable, saute à terre et s’enfuit à toutes jambes en vociférant comme un possédé. Ce qui avait causé son effroi n’était ni plus ni moins qu’un effroyable diable armé de cornes et tenant d’une main une fourche menaçante.