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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/321

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tence de mort, peu de temps après son installation sur le banc judiciaire. Le criminel convaincu du meurtre de sa femme avait nom James Craig.

Il commençait à faire brun et le plus profond silence régnait dans la cour. Le greffier demanda au criminel, suivant l’usage, s’il avait quelque chose à dire pour empêcher qu’une sentence de mort fût prononcée contre lui ; et le malheureux garda le silence.

Make proclamation ! dit le juge en chef d’une voix tremblante d’émotion. Les paroles solennelles de l’officier de la cour ordonnant le plus profond silence pendant le prononcé de la terrible sentence firent courir un frisson parmi les assistants. Le criminel, comme l’on verra bientôt, méritait la sympathie dont il était l’objet.

Le juge en chef ne put prononcer que les deux mots « James Craig » ! et, se couvrant le visage avec ses mains, il s’appuya la tête sur son pupitre et éclata en sanglots. Tout contribuait à émouvoir les assistants, la demi-obscurité qui empêchait de distinguer les traits du meurtrier immobile comme la statue de la mort, la crise nerveuse à laquelle le juge était en proie, les soupirs que les âmes sensibles s’efforçaient d’étouffer.

Craig fut exécuté malgré les efforts que l’on fit pour le sauver.

Il était un soldat d’artillerie qui jouissait d’un bon caractère et d’une certaine respectabilité ; il était sobre, économe, tandis que sa femme était ivrognesse et gaspilleuse. Il entra chez lui un soir, un sac d’argent à la main ; sa femme ivre commence par l’invectiver, et dans un