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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/334

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celui-ci est un véritable créquien (chrétien) qui vient de trépasser ?

Et pour s’assurer de la vérité de cette assertion, il avance la main pour lui palper le visage. Mais, ô horreur ! lorsque la main fut à la portée de la bouche de la momie, elle lui mordit le doigt à lui couper la dernière phalange de l’index ; le sang jailli, et pendant que Jean-Baptiste, les cheveux hérissés sur la tête, secouait les doigts à se les disloquer, le major avait repris sa pose première.

Les objets qu’offrait le musée n’étaient guère propres à calmer la frayeur dont les campagnards étaient saisis : c’était dans une des encoignures de la chambre un Goliath de Geth, armé de toutes pièces, dont la tête touchait au plafond. Le front du géant brisé par un gros caillou échappé de la fronde de David, le sang noir qui sortait à grands flots de la blessure, la fureur peinte dans les yeux du monstre expirant, tout en faisait un spectacle hideux et horrible à voir.

C’était, au milieu de la chambre, le général Hamilton blessé à mort, la poitrine percée d’une balle, la bouche ensanglantée, tombant entre les bras de son ami, tandis que son adversaire Burr tenait en main, d’un air farouche, l’arme meurtrière.

C’était le vieux général russe Sowarow qu’on voyait d’abord étendu sur une couche mortuaire, et se mettant ensuite lentement sur son séant aux yeux des spectateurs ébahis.

Cette dernière scène décida la retraite des campagnards :

— Sauvons-nous, mes amis, s’écria l’un d’eux : vous