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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/41

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MÉMOIRES.

— Tu rêves Babet ! (Elizabeth)[1] lui dit son époux ; le chien n’est jamais venu ici avec nous auparavant, il est impossible qu’il ait deviné la route que nous avons prise.

Mais c’était bien Montgomery qui avait suivi, l’espace de vingt-deux lieues, pendant la nuit, la piste des chevaux de son maître parti vers les six heures du matin.


Je crois que les enfants naissent généralement véridiques et qu’ils ne deviennent enclins au mensonge qu’à leur corps défendant. Les parents d’abord, et les maîtres ensuite, auxquels est confiée leur éducation, finissent par leur faire déguiser la vérité pour se soustraire aux châtiments dont ils sont menacés le plus souvent pour des peccadilles.

Je suis né naturellement véridique, je ne crois pas avoir fait un seul mensonge à mes parents, et je le dois en grande partie à la manière dont ils m’ont élevé, et à un incident en apparence assez insignifiant. Mon père sort un jour d’assez mauvaise humeur de son jardin en tenant un jeune concombre tronqué.

Je ne sais, dit-il à ma mère, qui peut avoir coupé ce concombre ? J’attends prochainement mon ami Couillard[2] qui se pique d’être un grand jardinier, et j’espérais remporter sur lui, ce printemps, le prix des pré-

  1. Elle était fille du chevalier de Saint-Luc.
  2. Monsieur Jean-Batiste couillard de Lépinay, seigneur de Saint-Thomas de la rivière du Sud, amateur passionné de l’horticulture.